Soulèvements de la Terre : texte d’Alain Damasio à lire...

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Soutenant Les Soulèvements de la Terre, ce « mouvement vital », l’écrivain Alain Damasio appelle à « monter en puissance ». Une mutation essentielle, selon lui, dans cette « période préfasciste ».

Alain Damasio est écrivain de science-fiction. Son dernier roman, Les Furtifs, a été publié en avril 2019 aux éditions La Volte.

Reporterre — Alain Damasio, faites-vous partie des Soulèvements de la Terre ?

Alain Damasio — « Comment ne pas en faire partie ? » serait la vraie question, tant ce mouvement est vital à tous points de vue et touche à deux enjeux essentiels de l’époque : faire que terre et eau restent des biens communs, disponibles à tous. La dissolution ne doit pas provoquer une dissolitude. Elle doit appeler au contraire à un immense rassemblement de nos forces vives.

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Comment prendre le relais des personnes aujourd’hui réprimées ?

En faisant honneur à leur combat, qui est le nôtre. En ne cessant de créer : des actions, des récits, des livres, de nouvelles organisations avec d’autres noms et d’autres slogans, plus forts et plus fins encore, en inventant des événements qui échappent aux pouvoirs et les devancent, en densifiant les alliances et les tissages sur le terrain. Et en n’oubliant pas que l’on n’a pas trouvé mieux pour fusionner les luttes, notamment sociales et écologiques, que de les inscrire dans un lieu et un temps communs, donc dans des territoires qui fassent sens et qu’on se réapproprie, dans des zones qu’on va libérer, dans des forêts, des squats, des friches ou des bocages où l’on saura être heureux autrement.

Quelle stratégie le mouvement écologiste devrait-il adopter pour survivre à cette dissolution ?

Déjà, il faudrait mettre un pluriel à la question tant la réussite d’une lutte, à mon sens, relève d’abord de la diversité des stratégies qu’elle est capable de mobiliser, d’entretisser et d’enchaîner, chacune déclinée en tactiques, plans, ruses, techniques, attaques ou frasques, d’autant plus efficaces qu’elles sont inattendues.

Face à un pouvoir en mode préfasciste, qui réprime la moindre expression divergente, qui cherche à écraser sous sa chimie libérale tout ce qui pousse, j’ai la sensation qu’il faudrait suivre, avec humour et profondeur, le conseil de Bruce Lee, dont le mantra ultime de l’art martial était « Be water, my friends, be water… » ("soyez comme l’eau, mes amis, soyez l’eau").

« Il faut se jeter à l’eau en passant à travers les gouttes »

À savoir, rester souple et fluide, mobile sur ses appuis, frapper et fuir, esquiver la frontalité où police et armée auront toujours l’avantage, glisser entre les doigts du pouvoir. Se jeter à l’eau en passant à travers les gouttes. Ne jamais se rêver citerne qui stocke : plutôt envier celles qui sont nées de la dernière pluie.

L’eau est de toutes les matières celle qui autorise le plus de changements d’état, elle devrait inspirer nos pratiques. Par exemple, une forme de devenir-brume ou d’identité-brouillard face à tous les dispositifs de surveillance et de tracking policier des militances. Une diffusion en delta des imaginaires désirables, par des récits amples, fluviaux, ramifiés. Des actions qui soient des averses, des draches, des trombes intempestives et d’autres qui soient des moussons qu’on attend avec joie, à l’image des saisons des Soulèvements. Des hommes-gourdes, des femmes-bouteilles, des enfants-torrents, des stratégies-rivières et des nuages de données pour épauler nos recherches, des archipels de luttes qui soient des lacs écossais et des combats juridiques glace contre glace, sous les décrets iceberg.
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